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L'absence de curage d'un affluent ne constitue pas toujours une faute

L'absence de curage d'un affluent ne constitue pas toujours une faute

Publié le : 05/02/2025 05 février févr. 02 2025

Sous réserve de conformité aux dispositions du code de l'environnement, l'absence de curage d'un affluent n'est pas toujours constitutif d'une faute.



Une administrée a fait l'acquisition d'une propriété qu'elle exploite comme agricultrice, et qui longe le Réart, un affluent d'un étang.



Ayant subi plusieurs inondations sur certaines de ses parcelles, elle a demandé au juge administratif de condamner le syndicat mixte du bassin versant du Réart à lui verser une certaine somme en réparation des préjudices qui lui auraient été causés et d'enjoindre à ce syndicat la réalisation de travaux de réfection des berges et de curage du lit du Réart de nature à remédier aux désordres subis.



La cour administrative d'appel de Toulouse, dans un arrêt du 21 novembre 2023, a condamné le syndicat et l'a enjoint à réaliser les travaux de réfection des digues.



Les magistrats d'appel ont estimé que le syndicat avait, en ne procédant pas au curage du Réart, commis une faute de nature à engager sa responsabilité.



Le Conseil d'Etat, par un arrêt du 18 décembre 2024 (requête n° 491092), a annulé l'arrêt d'appel.



En l'espèce, l'absence de curage du Réart résulte d'un choix délibéré des collectivités compétentes et de l'Etat visant à restaurer le delta du Réart à son embouchure avec l'étang de Canet Saint-Nazaire, afin notamment de lutter contre la dynamique de comblement de l'étang et de réduire les risques d'inondation des communes riveraines en aménageant des zones d'expansion des crues sur l'aval du cours d'eau.



Ainsi, d'une part, les objectifs ainsi poursuivis sont conformes, notamment, aux dispositions de l'article L. 211-7 du code de l'environnement, pour l'exercice de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.



D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que ce choix de gestion du Réart ne serait pas de nature à permettre l'atteinte de ces objectifs.



Par suite, en retenant que l'absence de curage du Réart était constitutif d'une faute du syndicat dans l'application de ces dispositions, la cour a inexactement qualifié les faits.



Le Conseil d'Etat a donc annulé l'arrêt d'appel.



EXTRAIT DE L'ARRET DU CONSEIL D'ETAT :



" 2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " I.-Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : / 1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ; /2°La protection des eaux et la lutte contre toute pollution (...) ; /3°La restauration de la qualité de ces eaux et leur régénération ; (...) II. La gestion équilibrée doit permettre en priorité de satisfaire les exigences de la santé, de la salubrité publique, de la sécurité civile et de l'alimentation en eau potable de la population. Elle doit également permettre de satisfaire ou concilier, lors des différents usages, activités ou travaux, les exigences : / 1° De la vie biologique du milieu récepteur, et spécialement de la faune piscicole et conchylicole ; / 2° De la conservation et du libre écoulement des eaux et de la protection contre les inondations ; / 3° De l'agriculture, des pêches et des cultures marines, de la pêche en eau douce, de l'industrie, de la production d'énergie, en particulier pour assurer la sécurité du système électrique, des transports, du tourisme, de la protection des sites, des loisirs et des sports nautiques ainsi que de toutes autres activités humaines légalement exercées (...) ". Selon l'article L. 211-7 du même code : " I. -Les collectivités territoriales et leurs groupements, tels qu'ils sont définis au deuxième alinéa de l'article L. 5111-1 du code général des collectivités territoriales, ainsi que les établissements publics territoriaux de bassin prévus à l'article L. 213-12 du présent code peuvent, sous réserve de la compétence attribuée aux communes par le I bis du présent article, mettre en œuvre les articles L. 151-36 à L. 151-40 du code rural et de la pêche maritime pour entreprendre l'étude, l'exécution et l'exploitation de tous travaux, actions, ouvrages ou installations présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence, dans le cadre du schéma d'aménagement et de gestion des eaux, s'il existe, et visant : / 1° L'aménagement d'un bassin ou d'une fraction de bassin hydrographique ; / 2° L'entretien et l'aménagement d'un cours d'eau (...) 5° La défense contre les inondations et contre la mer ; (...) 8° La protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides ainsi que des formations boisées riveraines (...) I bis.- Les communes sont compétentes en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. Cette compétence comprend les missions définies aux 1°, 2°, 5° et 8° du I. A cet effet, elles peuvent recourir à la procédure prévue au même I ". Aux termes de l'article L.213-12 du même code : " (...) V. - Les établissements publics territoriaux de bassin et les établissements publics d'aménagement et de gestion de l'eau constitués conformément au présent article ainsi que les syndicats mixtes mentionnés au VII bis exercent, par transfert ou par délégation opéré dans les conditions prévues à l'article L. 5211-61 du code général des collectivités territoriales et conformément à leurs objectifs respectifs, l'ensemble des missions relevant de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, définie au I bis de l'article L. 211-7 du présent code, ou certaines d'entre elles, en totalité ou partiellement, sur tout ou partie du territoire de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre concerné (...) ".



3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a jugé que le syndicat mixte du bassin versant du Réart avait, en ne procédant pas au curage du Réart, commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, en particulier du contrat de bassin versant de l'étang de Canet Saint-Nazaire conclu au titre des années 2017 à 2022, et il n'est au demeurant pas contesté que l'absence de curage du Réart résulte d'un choix délibéré des collectivités compétentes et de l'Etat visant à restaurer le delta du Réart à son embouchure avec l'étang de Canet Saint-Nazaire, afin notamment de lutter contre la dynamique de comblement de l'étang et de réduire les risques d'inondation des communes riveraines en aménageant des zones d'expansion des crues sur l'aval du cours d'eau. Dès lors, d'une part, que les objectifs ainsi poursuivis sont conformes à ceux fixés par les dispositions du code de l'environnement, notamment son article L. 211-7, pour l'exercice de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations et, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que ce choix de gestion du Réart ne serait pas de nature à permettre l'atteinte de ces objectifs, en retenant l'absence de curage du Réart était constitutif d'une faute du syndicat dans l'application de ces dispositions, la cour a inexactement qualifié les faits. "

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