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CJUE : l'organe en charge des procédures disciplinaires contre les juges doit être indépendant

Publié le : 07/06/2023 07 juin juin 06 2023

Pour la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), l'organe chargé de mener des procédures disciplinaires doit être indépendant et impartial.En Roumanie, une partie dans plusieurs affaires pénales a déposé des plaintes disciplinaires auprès de l’Inspection judiciaire compétente contre certains juges et procureurs impliqués. Toutes ses plaintes ayant été classées sans suite, elle a introduit une plainte contre l’inspecteur en chef, laquelle a également été classée sans suite. Elle s’est alors adressée à la cour d’appel de Bucarest pour contester ce classement sans suite, en faisant notamment valoir qu’il est impossible d’exercer des actions disciplinaires en raison de la concentration des pouvoirs entre les mains de l’inspecteur en chef. Une telle concentration des pouvoirs est, selon cette partie, contraire au droit de l’Union.
La cour d’appel de Bucarest a interrogé la Cour de justice de l'Union européenne à cet égard.
Par un arrêt du 11 mai 2023 (affaire C-817/21), la CJUE juge que l'organe en charge des procédures disciplinaires contre les juges doit être indépendant et impartial.En effet, la CJUE rappelle que, si l'organisation de la justice relève de la compétence des États membres, l'exercice de ce pouvoir doit respecter le droit de l'Union. Par suite, le régime disciplinaire applicable aux juges qui peuvent être appelées à appliquer le droit de l'Union doit présenter les garanties nécessaires afin d'éviter tout risque d'utilisation de celui-ci comme instrument de contrôle politique de leurs activités. En outre, la CJUE précise que les règles régissant l’organisation et le fonctionnement d’un organe compétent pour mener des enquêtes disciplinaires et pour exercer une action disciplinaire à l’encontre des juges et des procureurs doivent, en conséquence, respecter les exigences découlant du droit de l’Union et, en particulier, de l’État de droit. Pour la CJUE, il appartient à la juridiction de renvoi d'apprécier la réglementation roumaine en tant que telle et dans son contexte juridico-factuel national.
En l'espèce, la CJUE observe que, en droit roumain, une action disciplinaire destinée à réprimer des abus commis par l’inspecteur en chef ne peut être engagée que par un agent dont la carrière dépend, dans une large mesure, des décisions de l’inspecteur en chef. En outre, les décisions relatives à l’inspecteur en chef peuvent être révisées par l’inspecteur en chef adjoint, qui a été désigné par l’inspecteur en chef et dont le mandat prendra fin en même temps que ce dernier. Pour la Cour, un tel régime disciplinaire semble, sous réserve des vérifications à effectuer par la cour d’appel de Bucarest, de nature à faire obstacle, en pratique, à l’exercice effectif d’une action disciplinaire contre l’inspecteur en chef, même si celui-ci devait faire l’objet de plaintes sérieusement étayées.
Il appartient par ailleurs à la cour d’appel de Bucarest d’apprécier dans quelle mesure les pouvoirs dont disposent à cet égard les juridictions roumaines sont susceptibles de permettre l’exercice effectif d’actions disciplinaires contre l’inspecteur en chef ainsi qu’un traitement efficace et impartial des plaintes dirigées contre ce dernier. La Cour précise, à cet égard, que, dans l’hypothèse où cette juridiction devrait conclure que l’action de l’inspecteur en chef ne peut pas faire l’objet, dans le cadre de la réglementation en cause au principal, d’un contrôle réel et effectif, il y aurait lieu de considérer que cette réglementation n’est pas conçue de manière à ce qu’elle ne puisse faire naître aucun doute légitime, dans l’esprit des justiciables, s’agissant de l’utilisation des prérogatives et des fonctions de l’Inspection judiciaire comme instrument de pression sur l’activité judiciaire ou de contrôle politique de cette activité.

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