
Délégation par un ensemble contractuel : précision sur la durée unique
Publié le :
01/04/2025
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2025
La durée unique d'un ensemble contractuel ne peut excéder la durée normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement.
Une commune et une société ont conclu un contrat de délégation du service public du stationnement sur voirie, un contrat de concession, un contrat d'affermage et un quatrième contrat dit "commun" comportant des stipulations applicables à l'ensemble des contrats.
La cour administrative d'appel a rejeté, par un arrêt du 16 janvier 2024, la demande de la commune tendant à l'annulation de ces contrats.
Le Conseil d'Etat, dans un arrêt rendu le 17 mars 2025 (requête n° 492664), a rejeté le pourvoi.
En vertu de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales, la durée normale d'amortissement des installations susceptible d'être retenue par une collectivité délégante peut être la durée normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement, que cette durée coïncide ou non avec la durée de l'amortissement comptable des investissements.
De plus, aucune disposition législation ni aucun principe n'impose à la collectivité qui entend confier à un opérateur économique la gestion de services de conclure autant de conventions qu'il y a de services distincts.
Elle ne saurait toutefois, sans méconnaître les impératifs de bonne administration ou les obligations générales de mise en concurrence qui s'imposent à elle, donner à une délégation un périmètre manifestement excessif ni réunir au sein de la même convention des services qui n'auraient manifestement aucun lien entre eux.
Ainsi, la durée d'un tel contrat ou ensemble contractuel ne peut excéder la durée normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement, compte tenu des contraintes d'exploitation liées à la nature des services, des exigences du délégant et de la prévision des tarifs payés par les usagers.
Dans le cas où la délégation des différents services est prévue pour une durée unique qui n'apparaît pas justifiée pour chacun d'entre eux, une telle durée unique ne peut alors être valablement prévue que si l'exploitation conjointe des services considérés est de nature à assurer une meilleure gestion de ceux-ci et si la durée unique correspond à la durée normalement attendue pour que le concessionnaire puisse couvrir les charges d'exploitation et d'investissement de l'ensemble des services ainsi délégués, compte tenu des contraintes d'exploitation, des exigences du délégant et de la prévision des tarifs payés par les usagers.
En l'espèce, les quatre contrats constituaient un ensemble contractuel indissociable, étant donné qu'ils faisaient l'objet d'une même procédure de passation, ont été conclus à la même date pour une même durée et poursuivent le même objectif de répondre à un besoin de la commune en matière de stationnement, visant à atteindre un équilibre économique tenant compte de façon globale des investissements, des recettes et des charges prévisionnelles de toutes les activités liées au stationnement, sur la voirie et dans les parcs souterrains.
Le Conseil d'Etat a donc rejeté le pourvoi.
EXTRAIT DE L'ARRET DU CONSEIL D'ETAT :
" S'agissant de la durée des contrats en litige :
6. Aux termes de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " Les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée. Celle-ci est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire. Lorsque les installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée, de la nature et du montant de l'investissement à réaliser et ne peut dans ce cas dépasser la durée normale d'amortissement des installations mises en œuvre (...) ". Il résulte de ces dispositions que la durée normale d'amortissement des installations susceptible d'être retenue par une collectivité délégante peut être la durée normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement, compte tenu des contraintes d'exploitation liées à la nature du service et des exigences du délégant, ainsi que de la prévision des tarifs payés par les usagers, que cette durée coïncide ou non avec la durée de l'amortissement comptable des investissements.
7. Aucune disposition législative ni aucun principe n'impose à la collectivité publique qui entend confier à un opérateur économique la gestion de services dont elle a la responsabilité de conclure autant de conventions qu'il y a de services distincts. Elle ne saurait toutefois, sans méconnaître les impératifs de bonne administration ou les obligations générales de mise en concurrence qui s'imposent à elle, donner à une délégation un périmètre manifestement excessif ni réunir au sein de la même convention des services qui n'auraient manifestement aucun lien entre eux.
8. S'il est ainsi loisible à l'autorité délégante de regrouper au sein d'un même contrat ou d'un unique ensemble contractuel des services différents et de les confier à un même opérateur économique, un tel choix ne saurait lui permettre de déroger aux règles qui s'imposent à elle pour la dévolution et l'exploitation de ces services. En particulier, la durée d'un tel contrat ou ensemble contractuel ne peut, sauf à méconnaître les dispositions de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales précédemment citées, excéder la durée normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement, compte tenu des contraintes d'exploitation liées à la nature des services, des exigences du délégant et de la prévision des tarifs payés par les usagers. Dans le cas où la délégation des différents services est prévue pour une durée unique qui n'apparaît pas justifiée pour chacun d'entre eux, une telle durée unique ne peut alors être valablement prévue que si l'exploitation conjointe des services considérés est de nature à assurer une meilleure gestion de ceux-ci et si la durée unique correspond à la durée normalement attendue pour que le concessionnaire puisse couvrir les charges d'exploitation et d'investissement de l'ensemble des services ainsi délégués, compte tenu des contraintes d'exploitation, des exigences du délégant et de la prévision des tarifs payés par les usagers.
9. En l'espèce, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour juger que le contrat de concession pour le financement, la conception, la construction et l'exploitation du parc de stationnement souterrain sous la Grand'Place, le contrat d'affermage pour la rénovation, l'entretien et l'exploitation du parc de stationnement " Georges Clemenceau " et le contrat de délégation de service pour l'installation des équipements nécessaires au stationnement sur la voirie et leur exploitation, avec le contrat commun comportant des stipulations applicables aux trois contrats, conclus par la commune de Béthune avec la société Q-Park France, constituaient un ensemble contractuel indissociable, la cour administrative d'appel de Douai a retenu que ces quatre contrats ont fait l'objet d'une même procédure de passation, ont été conclus à la même date pour une même durée et poursuivent le même objectif de répondre à un besoin de la commune en matière de stationnement, visant à atteindre un équilibre économique tenant compte de façon globale des investissements, des recettes et des charges prévisionnelles de toutes les activités liées au stationnement, sur la voirie et dans les parcs souterrains. En jugeant ainsi que les quatre contrats liant la commune de Béthune à la société Q-Park France formaient un ensemble contractuel indissociable, la cour a, sans erreur de droit, exactement qualifié les faits de l'espèce.
10. Pour apprécier si ces contrats avaient pu être valablement conclus pour une durée unique de trente ans et se prononcer sur le moyen tiré de ce que cette durée était excessive pour ce qui concerne la délégation du service relatif au stationnement sur la voirie et le contrat d'affermage portant sur le parc de stationnement existant, la cour, devant laquelle il n'était pas sérieusement contesté que l'exploitation conjointe des trois services répondait à des objectifs de bonne gestion, a recherché si cette durée unique pouvait être regardée comme n'excédant pas la durée normale d'amortissement de l'ensemble des investissements mis à la charge du délégataire dans le cadre de l'ensemble contractuel portant sur le stationnement sur la voirie et dans les parcs. Ce faisant, elle n'a pas commis d'erreur de droit.
11. Pour contester l'appréciation portée, dans ce cadre, sur le caractère excessif de la durée des contrats en cause, la commune de Béthune ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir d'éléments qu'elle invoque pour la première fois devant le Conseil d'Etat, juge de cassation, en particulier la circonstance que cette durée serait excessive en ce qu'elle procurerait, selon elle, au délégataire une marge de rentabilité de 30 % anormalement élevée. Au vu des éléments débattus devant elle, la cour a relevé qu'il n'était pas contesté que le montant des investissements initiaux s'établissait à 11 495 000 euros hors taxes et celui des charges d'exploitation à 21 474 000 euros hors taxes, soit un montant total de 32 969 000 euros hors taxes et que la commune de Béthune se bornait à se référer à un rapport de la chambre régionale des comptes sans apporter aucun élément laissant supposer que, eu égard au montant des subventions publiques, le délégataire pourrait couvrir ses charges d'exploitation et d'investissement en moins de trente ans. La cour a tenu compte, pour évaluer les investissements du délégataire, de la subvention d'équipement versée à hauteur de 1 125 000 euros, conformément à l'article 11 du contrat de concession du parc de stationnement souterrain sous la Grand'Place et a considéré, compte tenu des contraintes d'exploitation liées à la nature du service et des exigences du délégant, tenant à l'obligation pour la société Q-Park France de ne pas intervenir dans l'organisation et la tarification du stationnement, aux prévisions des tarifs payés par les usagers et à la durée nécessaire à la réalisation des investissements, qu'il n'était pas établi que la durée de trente ans, retenue à l'article 3 du contrat commun, serait en l'espèce excessive. En jugeant ainsi, au vu des éléments versés dans le cadre de l'instruction devant elle et compte tenu de l'argumentation dont elle était saisie, que la durée unique retenue en l'espèce par les contrats en cause n'était pas excessive et ne méconnaissait pas les exigences résultant de l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales, la cour administrative d'appel s'est livrée, sans erreur de droit, à une appréciation souveraine des faits de l'espèce exempte de dénaturation. "
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