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QPC : présomption irréfragable de la perte de la nationalité française par désuétude

Publié le : 14/04/2025 14 avril avr. 04 2025

Le Conseil constitutionnel juge conforme à la Constitution les dispositions législatives relatives à la présomption irréfragable de la perte de la nationalité française par désuétude.Le Conseil constitutionnel a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative à la conformité à la Constitution de l’article 30-3 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-933 du 22 juillet 1993 réformant le droit de la nationalité.
En application de l’article 23-6 du code civil, la perte de la nationalité française peut être constatée par jugement lorsque l’intéressé, français d’origine par filiation, n’en a pas la possession d’état et n’a jamais eu sa résidence habituelle en France, si les ascendants, dont il tenait la nationalité française, n’ont eux-mêmes ni possession d’état de Français, ni résidence en France depuis un demi-siècle.Les dispositions contestées de l’article 30-3 du même code prévoient que, lorsque ces mêmes conditions sont remplies, l’intéressé n’est pas admis à apporter la preuve de sa nationalité française par filiation et que le tribunal doit alors constater la perte de cette nationalité.Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que ces dispositions interdisent, lorsque les conditions qu’elles posent sont réunies, de rapporter la preuve de la transmission de la nationalité française par filiation, en rendant irréfragable la présomption de perte de celle-ci par désuétude.
En premier lieu, il ressort des travaux préparatoires de l’ordonnance n° 45-2441 du 19 octobre 1945, dont sont issues les dispositions de l’article 23-6 du code civil, que le législateur a entendu tenir compte du caractère perpétuel de la transmission de la nationalité française par filiation dans le cas de personnes établies à l’étranger depuis plusieurs générations et qui n’ont pas conservé la possession d’état de Français. En mettant fin à cette transmission lorsque la nationalité française est dépourvue de toute effectivité, il a poursuivi un but d’intérêt général.
Pour la mise en œuvre de cette règle, les dispositions contestées, telles qu’interprétées par la jurisprudence constante de la Cour de cassation, font obstacle à ce que l’intéressé se prévale à tout moment de la procédure d’éléments établissant une possession d’état postérieure à l’expiration du délai cinquantenaire. Ce faisant, elles poursuivent l’objectif de valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice.
En deuxième lieu, le juge, qui est tenu de vérifier que sont réunies les conditions de la perte de la nationalité française par désuétude, prend en compte les éléments produits par l’intéressé pour établir que, dans le délai cinquantenaire, lui-même ou celui de ses ascendants susceptible de lui avoir transmis la nationalité française ont eu la possession d’état de Français.A cet égard, les dispositions contestées ne permettent pas au juge de constater la perte de la nationalité française de l’intéressé dans le cas où, au regard des éléments dont il dispose sur la situation personnelle de ce dernier, sa décision aurait pour résultat de le rendre apatride.
En dernier lieu, d’une part, il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que les dispositions contestées ne peuvent être opposées à des enfants mineurs au jour de l’introduction de l’action déclaratoire si elles ne l’ont pas préalablement été à leur ascendant.D’autre part, il résulte de l’article 21-14 du code civil que la personne à laquelle a été opposée la règle prévue par les dispositions contestées peut réclamer la nationalité française par déclaration, en se prévalant notamment des liens manifestes d’ordre culturel, professionnel, économique ou familial, qu’elle a conservés ou acquis avec la France.
Dès lors, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée aux exigences constitutionnelles précitées. Le grief tiré de la méconnaissance de ces exigences doit donc être écarté.
Dans une décision n° 2025-1130/1131/1132/1133 QPC du 11 avril 2025, le Conseil constitutionnel juge que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus les autres exigences de l’article 16 de la Déclaration de 1789, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution.
SUR LE MEME SUJET :
Perte de la nationalité pour désuétude : transmission de QPC - 13 janvier 2025

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